• On ne doit pas toujours accorder toutes choses, ni à tous. Il est aussi louable de refuser avec raison que de donner à propos. C'est en ceci que le non de quelques-uns plaît davantage que le oui des autres. Le refus accompagné de douceur et de civilité satisfait davantage un bon cœur qu'une grâce qu'on accorde sèchement.
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  • Il y a de l'esprit à savoir choisir un bon conseil, aussi-bien qu'à agir de soi-même. Les plus judicieux ont moins de peine à consulter les sentiments des autres, et c'est une sorte d'habileté de savoir se mettre sous la bonne conduite d'autrui.
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  • La contradiction doit éveiller l'attention, et non pas la colère. Il faut écouter et non fuir celui qui contredit. Notre cause doit toujours être celle de la vérité, de quelque façon qu'elle nous soit montrée.
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  • Dans la connaissance des choses humaines, notre esprit ne doit jamais se rendre esclave, en s'assujétissant aux fantaisies d'autrui. Il faut étendre la liberté de son jugement, et ne rien mettre dans sa tête par aucune autorité purement humaine. Quand on nous propose la diversité des opinions, il faut choisir, s'il y a lieu ; sinon, il faut demeurer dans le doute.
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  • L'ignorance donne de la faiblesse et de la crainte ; les connaissances donnent de la hardiesse et de la confiance. Rien n'étonne une âme qui connais toutes choses avec distinction.
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  • C'est un défaut bien commun de n'être jamais content de sa fortune, ni mécontent de son esprit.
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  • Il y a de la bassesse à tirer avantage de sa qualité et de sa grandeur pour se moquer de ceux qui nous sont soumis.
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  • La honte qu'on a de se voir loué sans fondement donne souvent sujet de faire des choses qu'on n'aurait jamais faites sans cela.
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  • Il vaut presque mieux que les Grands recherchent la gloire, et même la vanité, dans les bonnes actions, que s'ils n'en étaient point du tout touchés : car, encore que ce ne soit pas les faire par les principes de la vertu, l'on en tire au moins cet avantage, que la vanité leur fait faire ce qu'ils ne feraient point sans elle.
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  • La vertu n'est pas toujours où l'on voit des actions qui paraissent vertueuses : on ne reconnait quelquefois un bienfait que pour établir sa réputation, et pour être plus hardiment ingrat aux bienfaits qu’on ne veut pas reconnaître.
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  • Quand les Grands espèrent faire croire qu'ils ont quelque bonne qualité qu'ils n'ont pas, il est dangereux de montrer qu'on en doute : car en leur ôtant l'espérance de pouvoir tromper les yeux du monde, on leur ôte aussi le désir de faire de bonnes actions qui sont conformes à ce qu'ils affectent.
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  • Quoique la plupart des amitiés qui se trouvent dans le monde ne méritent point le nom d'amitié, on peut pourtant en user selon les besoins, comme d'un commerce qui n'a pas de fonds certain et sur lequel on est ordinairement trompé.
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  • L'amour a un caractère si particulier, qu'on ne peut le cacher où il est, ni le feindre où il n'est pas.
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  • Tous les grands divertissements sont dangereux pour la vie chrétienne ; mais entre tous ceux que le monde a inventé il n'y en a point qui soit plus à craindre que la Comédie. C'est une peinture si naturelle et si délicate des passions qu'elle les anime et les fait naître dans nôtre cœur, et surtout celle de l'Amour, principalement lors qu'on se représente qu'il est chaste et fort honnête : car, plus il paraît innocent aux âmes innocentes, et plus elles sont capables d'en être touchées. On se fait en même temps une conscience fondée sur l'honnêteté de ces sentiments, et on s'imagine que ce n'est pas blesser la pureté que d’'aimer d'un amour si sage. Ainsi on sort de la Comédie le cœur si rempli de toutes les douceurs de l'amour, et l'esprit si persuadé de son innocence, qu'on est tout préparé à recevoir ses premières impressions, ou plutôt à chercher l'occasion de les faire naître dans le cœur de quelqu'un, pour recevoir les mêmes plaisirs et les mêmes sacrifices que l'on a vus si bien représenté sur le théâtre.
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